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ENVIRONNEMENT ET PAYSAGES SONORES
ARTS SONORES ET ESPACES AMBIANTS

Dans cet opus 2 consacré à l'environnement et au paysage sonore, nous aborderons l'installation du son, à partir du moment où l'une de ses principales visée est en rapport étroit avec l'environnement. Avec ces installations au sens large du terme, qu'elles soient purement acousmatiques ou convoquent des réalisations plastiques, sculpturales, des principes mécaniques, voire des actes performatifs, plusieurs approches seront abordées. Le son installé pourra être un  moyen, de mettre en valeur l'esthétique audible des milieux, le révélateur des composantes auriculaires, l'initiateur de démarches ludiques ou le pourvoyeur d'outils pédagogiques pour ouvrir nos oreilles sur le Monde...

Les arts sonores et les espaces ambiants


La révélation de l'espace sonore

Installer du son, c'est forcément jouer dans l'espace, et surtout avec l'espace. Lorsque l'on considère l'espace publique, et plus particulièrement l'espace extérieur force et de constaté qu'il est déjà fortement habité par les sons, surtout en milieu urbain. Pourquoi donc rajouter du son aux sons ? Même avec des visées esthétiques très affirmées, le fait de surenchérir dans un espace auditif parfois saturé, et qui plus est si l'installation est pérenne, ne risque t-il pas de provoquer une réaction de rejet par les passants auditeurs et riverains.
 Le cas De Max Neuhaus est emblématique, en tous cas pour ce qui est du travail avec l'espace doublé d'une conscience aigu de l'environnement sonore, y compris concernant les préoccupations écologiques actuelles. Depuis trente ans, Max Neuhaus réfléchit et travaille sur les relations des sons, des espaces de vie et du rôle de révélateur que peuvent jouer des installations sonores in situ. La première action artistique et militante que nous pouvons citer est Listen. Listen n'est pas une installation, mais plutôt un parcours performance pour aller à la découverte des sons "naturels, urbains, comme Cage lui-même a souvent tenter de la faire. Il s'agissait au départ d'emmener un groupe sur des lieux préalablement repérés pour la richesse de leurs sources, ou des effets acoustiques présents, en lui donnant la consigne d'écouter, tout simplement ! Pour accentuer la consigne, Neuhaus tamponnait le mot "Listen !" sur les mains des participants. Puis, plus radicalement, il s'es contenté d'afficher, dans certains lieux, de grands panneaux toujours avec cette consigne d'écouter. Cette fois-ci, le son urbain devenait, par la seule force de proposition de Neuhaus, une installation permanente et omniprésente, accessible à tous et à n'importe quelle heure du jour et de la nuit. A condition de bien vouloir rentrer dans le jeu  et partir à la découverte de nouveaux territoires d'écoute.


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Time Space de Max Neuhaus



En écoute
Time Space de Max Neuhaus



Deuxième exemple tiré de l'oeuvre de Max Neuhaus : Time piece, une installation sonore pérenne conçue pour les alentours du Kunsthaus, musée de la ville de Graz en Autriche. L'installation procède uniquement par des sons installés, sans autres mécanismes. Au pourtour du musée, dans le jardin public, sont installés des Hauts-parleurs diffusant en acousmatique (sans voir les sources), des sons sinusoïdaux agrémentés d'harmoniques, et ceci à des instants précis. Ces sons sont déclenchés toutes les heures, moins dix minutes (midi moins dix, une heure moins dix...). Ils partent du silence et, sans attaque audible, montent en puissance, progressivement, durant cinq minutes. Ils ne sont donc que peu ou pas perceptibles, tant leur neutralité et leur très lente évolution les fondent dans l'environnement sonore ambiant. Au bout de cinq minutes, ils stoppent brutalement et là, l'auditeur les perçoit nettement par ce que l'on appelle l'effet de coupure, c'est à dire leur soudaine absence de l'écoute, supprimés net par un arrêt "coup de sabre".
Nous avons tous fait l'expérience d'une ventilation bruit de fond, que son omniprésence masquait à notre écoute, et qui tout d'un coup s'arrête. Le "silence" subit que génère cet arrêt nous fait percevoir rétrospectivement, par son absence, l'importance que tenait ce son dans l'espace, et de ce fait, nous le conservons en mémoire alors que nous ne l'entendions plus lorsqu'il se produisait. De plus, sa libération de l'espace qu'il occupait décuple notre écoute, et nous fait percevoir des détails auditifs dont nous n'avions pas spécialement conscience. Neuhaus joue à fond sur ce jeu de perception, cet effet de coupure à la fois si simple et si spectaculaire, pour émoustiller notre écoute.
Mais sa démarche va encore plus loin. Les fréquences des sons diffusés et brusquement arrêtés sont calquées sur celles des cloches de la ville. Lesquelles se mettront en branle quelques minutes après la fin du signal de Neuhaus, en réminiscence sonore du son disparu. Cet écho sera d'autant plus fort, plus perceptible, comme un véritable signal culturel rythmant la ville de Graz depuis des années, qu'il aura été finement préparé par l'installation sonore. Un exemple très significatif d'une installation environnementale sensible et intelligente. Neuhaus signe là un remarquable travail sur l'espace, sans imposer à l'auditeur une écoute forcée. Beaucoup de passants ne remarqueront peut-être même pas son installation, ou tout au plus la percevront-ils inconsciemment, alors que d'autre qui s'y arrêteront en comprendront toute la finesse et saisiront le "regard porté" sur notre environnement.
Max Neuhaus a d'ailleurs travaillé sur d'autres diffusions  urbaines, dans des lieux acoustiquement sursaturés, pollués dirait on ici, et où la communication était très difficile, sinon impossible par moment. Il a installé de façon pérenne, des bourdonnements sonores dans des bouches d'aération de métro de  Time Square, un quartier de Manhatan fort fréquenté et donc très bruyant.  Les sons qui sont à la fois discrets mais clairement localisés et émergents, focalisent l'écoute sur des sources sonores  inhabituelles, questionnant ainsi sur le changement opéré dans cet espace auditif très touffu, et sur ses composantes auriculaires.

Visiter le site de Max Neuhaus (des textes très intéressants, en anglais seulement)

Je me suis peut être étendu sur la description de certaines installations de Max Neuhaus, mais il m'a semblé nécessaire de le faire pour comprendre la pertinence de la démarche environnementale de ce pionnier des arts sonores.

La sensation des volumes architecturaux
Lorsque l'on parle d'environnement sonore, ou auditif si l'on veut lui donner moins de coloration psycho-sensorielle, on ne doit pas prendre en compte uniquement le milieu extérieur, les espaces naturels ou urbains, mais aussi les espaces intérieurs, les constructions architecturales. On sait, au-delà des sources sonores émises, des matériels qui les diffusent (ampli, HP...), que la surface, les volumes et les formes, les matières et matériaux de constructions et d'aménagement employés, l'ameublement, la plus ou moins grande présence humaine, apportent des modifications très sensibles à l'écoute des sons ambiants, les colorant, les amortissant ou les amplifiant, les démultipliant ou les filtrant... Toutes ces colorations, parfois fort spectaculaires, influencent non seulement l'écoute, mais souvent  le geste créateur-même. L'artiste choisira des sons, des modes de production, de diffusion, des postures d'écoute en adéquation (ou en décalage) avec les lieux investis. On parle d'ailleurs assez souvent de sensation d'espace intérieur, de volumes. Faites l'expérience de vous laisser guider, en fermant les yeux, dans une succession de lieux aux volumes différents, et vous sentirez combien, l'oreille et le corps tout entier parviennent, par l'écoute aussi par des sensations physiques de pression, à modéliser intérieurement un espace, à penser et à se représenter mentalement sa morphologie.
Le fait d'utiliser les lieux et leurs caractéristiques acoustiques comme espaces de création et de diffusion n'est pas nouveau. Les compositeurs et chanteurs de musique grégorienne savaient très bien utiliser les résonances fusionnelles des vastes bâtiments de pierres, jouant sur de longues phrases lentes et riches en voyelles, et sur une diction appropriée, alors que le théâtre à l'italienne a au contraire recherché, par l'acoustique architecturale, une discrimination très nette de la parole et des instruments de musique développant des jeux plus véloces et virtuoses.
Certains compositeurs-installeurs ont été assez loin dans la démarche d'écoute d'un lieu, prenant ce dernier comme "acteur" à part entière de la construction sonore.
Le lieu ne se contente plus dans ce cas là d'accueillir l'oeuvre, de l'abriter, de permettre des déambulations du public, mais il devient une composante essentielle de la création sonore, comme un résonateur à grande échelle. C'est un peu comme si l'auditeur se trouvait dans le corps acoustique d'un instrument de musique, à l'intérieur d'une caisse de violon, d'un pavillon de cuivre, pour écouter les sons au coeur du dispositif de production et d'amplification tout à la fois.
Un compositeur à tout particulièrement expérimenté ses sensations d'écoute très grisantes, La monte Young. On citera ici ses fameuses installations "Dream House", où sont diffusés simultanément deux, ou plusieurs sons, de fréquences très proches et généralement assez graves. La disposition des haut-parleurs en fonction des volumes, fait entendre un bourdonnement qui reste quasiment fixe, non évolutif, si l'auditeur ne bouge pas, mais, par un jeu complexe de noeuds sonores, d'ondes stationnaires, qui évolue au gré des déplacements, créant ainsi un espace acoustique mouvant. Cet situation d'écoute perturbe les sensations d'espaces, de volumes, dans une sorte de perte de repères sensoriels. Cette sensation envoûtante, que l'on a d'ailleurs assez justement qualifié de psychédélique, est renforcée par une ambiance colorée rose (pour celle que j'ai pu visiter à Lyon), participant à cette sensation de déphasage sensoriel, absolument irritante pour certains visiteurs et captivante pour d'autres. En tous cas, ce travail sur l'espace acoustique et visuel, mettant à contribution la participation active du visiteur, de par ces choix de mouvements ou d'immobilité est un exemple significatif d'installations jouant de façon très forte avec l'environnement ambiant et les jeux perceptifs, qui y seront à la fois intégrés et fabriqués en temps réel.


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Installation "Dream House" de La Monte Young

Visiter le site consacré aux "Dream House"

J'ai également assisté à une performance vocale et physique d'un artiste, dont je ne suis plus vraiment sûr du nom, mais je pense qu'il s'agit de Georges Boissonade. Cet artiste avait travaillé au couvent de la Tourette à Eveux, splendide construction de l'architecte Le Corbusier, sur un projet consistant à jouer avec la résonance des lieux activés par sa propre voix. Il nous en a fait une démonstration dans l'une des salles voûtées des Greniers aux subsistances à Lyon, actuellement centre de création et de diffusion artistique (Les Subs). Le public était invité à s'asseoir au centre de la pièce, dotée d'une belle  et longue réverbération, et à écouter, yeux fermés, les performances vocales de l'artiste en perpétuel mouvement, qui faisait "chanter" les pierres de l'édifice par l'entremise de cris et de mélopées issues des chants dyphoniques (ou harmoniques) de Mongolie ou du Tibet. Cette performance installait littéralement des sons à la fois au caractère immersif, réverbérés par une acoustique englobante, type église romane, et parfaitement localisables par leurs trajectoires dans l'espace architectural. Encore un bel exemple d'une utilisation du sonore comme excitateur de l'espace acoustique ambiant et comme révélateur de ses effets induits par l'architecture des lieux et les matériaux de construction (la pierre).
Si l'on ne peut pas parler ici de véritable écologie sonore, expression plutôt réservée à l'étude des milieux extérieurs, on peut néanmoins remarquer que ces expressions artistiques font référence explicitement aux caractéristiques auditives des espaces architecturaux, et impliquent une participation active de l'oreille qui ne peut que la sensibiliser à leur écoute, et pousser l'auditeur à rechercher un confort d'écoute au quotidien.
On pourrait citer bien d'autres exemples exploitant les caractéristiques acoustiques des lieux, au service de la création artistique.

Du son patrimonial dans l'espace publique

En troisième point, nous aborderons le jeu sur des sonorités relevant de ce que j'appellerais le patrimonial dans l'espace publique. On définit le patrimoine comme étant à la fois un héritage du passé dont nous profitons aujourd'hui, et que nous transmettrons aux générations à venir. Telle et en tous cas la définition donnée par l'Unesco. Hériter d'un patrimoine, fut-il immatériel, tel une langue, la musique, des sons, dans le but de le pérenniser, d'en faire don à nos successeurs suppose en priorité de conserver ce patrimoine en l'état, et parfois de le sauvegarder des risques, multiples, pouvant entraîner sa disparition, ou une dégradation telle qu'il deviendrait alors intransmissible.
Mais comment définir un patrimoine sonore, qui appartiendrait à la collectivité, donc en "libre écoute" et qui plus est serait accessible dans l'espace publique ? Quels sont les sons, ou tout au moins les objets sonores qui pourraient prétendre à un statut patrimonial?
Il est un domaine qui me vient d'emblée à l'esprit, et il s'agit de l'art campanaire. La terminoilogie de l'art campanaire renvoie à la fois à l'art musical (la cloche instrument) et à l'art sonore (la cloche objet signal).

 La cloche est un objet ancestral. Elle rythme depuis des millénaires la vie quotidienne d'une cité. Objet cultuel, appel à la prière, mais aussi journal auditif véhiculant moult informations telles que l'heure, les naissances, baptêmes, décès, la cloche a aussi servi de guide pour les voyageurs égarés dans le brouillard, de  signal d'alarme  pour avertir des incendies, guerres, risques en tous genre... La cloche à longtemps été un objet sacré, signe de puissance pour ses possesseurs, volée et convoité en maintes occasion, retirée d'un village pour le punir d'une faute grave... De plus, la cloche est bel et bien un objet musical, véritable instrument accordé, avec un savoir-faire dans sa fabrication et les matériaux employés, qui servent avant tout la qualité sonore. Cet instrument, pour en finir avec ce tableau, sans trop tomber dans un dythirambisme carrillonant, est une véritable  installation sonore à ciel ouvert, à l'échelle d'une ville, d'un quartier, d'un lieu sur lequel les sonneries étendent ponctuellement un "chapeau sonore", véritable repère et signature acoustique dans lequel se reconnaîtront les habitants.
L'aspect patrimonial me paraissant justifié, j'ajouterai que, comme beaucoup de patrimoines, l'art campanaire est menacé dans son intégrité et dans sa pérennité. On rencontrera nombre de cloches malmenées, dégradées, peu ou pas entretenues, ou pire encore  réduites au silence sous prétexte de nuisance sonore. On touche là un problème culturel sensible, qui fait confondre  la nuisance d'un marteau piqueur avec le signal culturel d'une cloche, en ne résonant (c'est bien le cas de le dire) que sur une notion de décibels, en galvaudant tout critère social, esthétique, qualitatif au profit d'une lutte contre le bruit parfaitement irraisonnée. S'appuyer systématiquement sur des mesures quantitatives, sonomètres à l'appui, en ignorant le qualitatif est une façon de ne plus laisser, dans les espaces urbains, que la seule hégémonie des bruits, tout signal culturel ayant été supprimé par un malheureux amalgame. Et la cloche est également en danger dans les alpages, celle portée au coup des vaches, orchestre rythmant le temps et l'espace montagnard, menacée par l'incompréhension aveugle de certains citadins avides de "silence" à n'importe quel prix.
A l'aune de cette approche quelque peu militante convenons en, revenons  à l'art sonore en espace publique, avec un compositeur espagnol : Llorenç Barber. Ce dernier a utilisé régulièrement les cloches, surtout en environnement urbain, dans le cadre de ses compositions et de concerts animant tout l'espace par des sons carillonnés. L'auditeur se trouve ainsi  immergé dans un flot sonore où se répondent, dans une vaste mise en espace, tous les clochers de la ville, synchronisés dans leurs sonneries et mis en valeur par une composition tenant compte de leurs spécificités propres. Le compositeur joue ici avec l'idée d'une diffusion à grande échelle qui fait sonner la ville, et où chaque déplacement d'un promeneur-écoutant change la perception d'un paysage sonore mis en branle, pour titiller l'oreille et faire (re)découvrir son espace auditif, en rendant hommage à ce bel objet sonore qu'est la cloche.


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llorenç Barber

Hormis ces performances campanaires, Murray Schaffer avait saisi toute la beauté des sons de sirènes de bateaux naviguant dans le port de Vancouver, et avait initié des" concerts" de cornes et de sirènes maritimes, développant dans de larges espaces, d'incroyables sonorités qui venaient ponctuer un espace d'écoute transcendé. Ces sons, à l'origine signaux avertisseurs, donc puissants et identifiables, surtout par temps de brouillard, deviennent par le jeux d'un compositeur "d'étendue sonores" pour reprendre une expression de Bastien Gallet, des composantes d'un environnement sonore qui, pour le temps d'une performance, se prêtent au jeu d'une écoute "musicale",  par le travail d'organisations spatio-temporelles et l'agencement de timbres familiers.
On peut également citer le travail de Bill Fontana, pour qui la notion d'environnement et de paysages sonores est quasi omniprésente dans son travail. Ainsi, il procède à l'extraction d'ambiances sonores d'une ville (phonographies) et les transporte dans un autre lieu donné (un autre quartier, une autre ville), avec un effet recherché de "superposition complémentaire", par le fait de rajouter des sons de même nature (des sonorités urbaines) à ceux préexistants dans un espace donné, mais aussi de décalage.  L'idée de ce décalage, comme un glissement perceptif dépaysant vient du fait de capturer (enregistrer)  des sons de la vie quotidienne captés en un point X , et de les restituer dans un point Y, un autre lieu qui possède déjà ses propres sons, mais qui les assimilent néanmoins pour donner naissance à un nouveau paysage sonore. Si par exemple on superpose, par une transposition temporelle, parfois en temps réel, et un déplacement géographique, des sons de Calcutta à des sons parisiens, et vis et versa, on créera un effet "d'exotisme tout à fait dépaysant et intriguant pour l'oreille.
On se trouve là encore dans une expérimentation des espaces sonores publiques qui nous questionnent sur ce que peuvent être les aspects patrimoniaux de notre environnement sonore, et sur les façons de mettre en éveil nos écoute pour  prendre conscience à la fois de leurs beautés intrinsèques, mais aussi des dangers qu'ils courent dans notre civilisation aussi trépidante que bruyante.

Dans l'opus 3 consacré aux arts sonores "environnementaux", nous continuerons à visiter quelques installations sonores spécifiques, où des plasticiens jouent avec les caractéristiques acoustiques des lieux, les matières et matériaux que l'on y trouve, et créent une scénographie sonore innovante dans des espaces naturels.









 
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