CITY SONIC 2012
BAUDOUIN OOSTERLYNCK
Depuis déjà quelques années, je suis avec intérêt le travail de Baudouin Oosterlynck, sur la toile et au fil de quelques
festivals.
Ses approches de l'écoute, via des installations, des recensements de sites auriculaires, la recherche d'objets ou
d'architectures d'écoute, me font mesurer la diversité et la pertinence de ses travaux.
Et si l'oreille était orientée différemment, ou placée ailleurs, autrement, s'il elle n'avait pas la même forme... Comment
entendrions-nous?
Comment penser de nouvelles architectures sonores ?
Existe t-il des zones de silence musicaux en milieu naturel ?...
Ce sont là quelques questions que se pose cet infatigable investigateur de la chose sonore.
Ce dernier n'est certes pas connu à sa juste valeur, au regard de la diversité et de l'importance de ses travaux, mais je pense qu'il l'a voulu ainsi, pour sans doute garder l'entière liberté de ses travaux.
City Sonic lui propose cette année une sorte de carte blanche dans l'un des lieu phare du festival, la Chapelle Saint-Georges, sur la Grande place de Mons, qui a déjà accueilli tant de belles expositions.
Le lieux est pour l'occasion divisé en trois espaces. Le premier nous présente un inventaire de sites géographiques
présentant des qualités de silences extraordinaires. Cartes en relief, notes et croquis à l'appui, après 15000 KM à pied et à vélo, Baudouin nous livre une partie et surtout la méthodologie
de cet incroyable inventaire
La deuxième partie nous présente une architecture de verre composée d'une grande serre sonore. Elle est construite de cinq
panneaux, plus un sixième présentant un espace ouvert, porte pour pénétrer à l'intérieur.
En collant l'oreilles aux parois vitrées, on entend sur chaque panneau une musique différente, partant de simples accords
harmoniques pour aller vers des compositions musicales de plus en plus complexes. En pénétrant à l'intérieur, on découvre, sans coller l'oreille cette fois-ci, l'ensemble des sources sonores
réunies dans une subtile composition aussi cristalline que l'habitacle qui la diffuse. Tout simplement magique ! De plus, la transparence de l'ensemble laisse le regard du visiteur traverser
cette architecture sonore sans venir interrompre la belle perspective architecturale de la chapelle.
Enfin, sur une scène-autel surélevée, on trouve un piano, et tout près, une table présentant divers étranges et beaux objets,
stéthoscopes modifiés, terminés par des bulbes de verres, stéthoscopes de mécanicien des années 30, pour ausculter les moteurs de voitures... Le visiteur est alors invité à écouter des micros
sonorités, en explorant les cordes ou le cadre d'un piano, chaussé de ces appendices d'écoute. Et là encore, effet garanti, la surprise est au bout de l'oreille. On ne se lasse pas de glisser ces
bulbes de verre ou tiges de métal sur les différentes parties du piano et d'aller cueillir ses "chants intimes". L'expérience étant difficile à narrer, il faut la vivre in situ pour en saisir la
beauté, à la fois si simple et si complexe.
Ce parcours d'écoute propose donc une gradation en trois étapes dans l'échelle sonore.
Le premier point, qui en fait ne nous donne rien à entendre, nous demande d'imaginer de vastes paysages, en grande partie
montagnards, peuplés de silences paysagers, mais néanmoins oh combien musicaux.
Le second alterne, via une architecture dédiée, une écoute oreille collée à une écoute à l'air libre, dans un volume à la
fois assez grand et à la fois refermé de l'intimité d'une cabane de verre.
Le troisième quand à lui, nous oblige à aller tendre l'oreille vers l'écoute microscopique, à ausculter la matière-même,
quasiment au cœur des sons.
C'est donc un parcours-expérience en entonnoir qui nous est proposé, du plus vaste, une sorte d'écoute macroscopique, au plus
infime, vers les sources microscopiques.
Une exposition incontournable à voir et à entendre !