Le quartier, ses habitants, les promeneurs écoutants, les guides, tous ont joué le jeu de la belle écoute !
Espaces sonores festifs, boulevards vrombissnts, squares joliment isolés, cour intérieure extraordinaire, acoustiquement et visuellement, rues commerçantes très cosmopolites où la musiques des langues a fait son effet, place intime entourée de grands bâtiments vitrés, en arcs de cercles, une merveille à l'oreille…
Diversités, passages, tensions, détentes, coupures, poésie, un quartier où tout y est à qui sait l'entendre.
Y compris des points de vue, des couleurs, des odeurs de poulets rôtis et de menthe fraîchement manipulée, le tous exacerbé par la posture d'immersion sensorielle que propose la balade sonore.

En prenant du recul, il me semble que l'expérience d'écoute repose sur une pratique, une sorte d'alchimie, aussi simple qu'efficace.
Repérer les lieux pour en saisir, non pas les sources sonores, souvent trop fugaces et volatiles, mais les belles ambiances acoustiques caractéristiques.
Mettre les écouteurs en condition par un petit exposé préalable ou histoires, postures et esthétiques forgent, soudent un groupe d'écoutants concentrés et dynamiques.
Installer une écoute silencieuse, personnelle, tout en profitant de l'énergie, de la dynamique d'un geste collectif, partagé.
Guider en trouvant un bon rythme de marche, des arrêts et des trajectoires liés aux événements in situ, jouer de l'immersion, rester dans le circuit tout en se ménageant une part de sérendipité, la possibilité d'effectuer en live des mixages impromptus, des transitions, des coupures, des zooms acoustiques…
Sentir l'énergie du groupe, lui renvoyer, satisfaire ses attentes tout en restant le maître de l'écoute et en proposant de l'inédit, de l'inouïe, du sensible à fleur de peau, et d'oreille…
Ménager, en fin de parcours, un temps de restitution, de parole, pour libérer et partager les émotions vécues durant la promenades, commenter, sortir en douceur de notre bulle d'écoutant…
Tout cela semble évident, mais l'énergie, l'expérience et la maîtrise de l'écoutant guide, issue de multiples expériences déambulatoires, ne va pas pour autant de soi.
D'ailleurs ce modèle d'écoute que je nomme "à oreilles nues" ne constitue pas une recette de cuisine transposable tel quel sur tout espace et projet d'écoute, plutôt une une base de réflexion, ou une invitation à tenter l'expérience.

Une fois encore, les autochtones et travailleurs vivant et pratiquant le quartier s'étonnent de leur méconnaissance sensorielle des lieux, et c'est plutôt bon signe. Signe d'une ouverture vers de nouvelles perceptions des lieux, d'un élargissement de ses espaces sensoriels.

 

Balade sonore proposée par Desartsonnants (Gilles Malatray) et Atelier 500 (Nathalie Bou)